Encore le Style de l’Acier – Frédérick Martin

2,00

Œuvre pour percussion solo de Frédérick Martin.
Percussion : Lucas Genas
Prise de son et direction artistique : Mathilde Genas
Montage et Mixage : Mathilde Genas

Enregistré du 24 au 27 avril 2017 à l’Auditorium du Trente, Vienne (38200).

 

Description

Encore le style de l’acier – 7′53″

Compositeur : Frédérick Martin
© GERARD BILLAUDOT EDITEUR

Œuvre dédiée à Emmanuel Séjourné

A propos de l’œuvre – Par William Blank / Juillet 2017

Musique Eruptive

Il y a dans la musique de Frédérick Martin une énergie qui puise sa force autant dans des gestes musicaux primordiaux que dans une savante organisation des contraires ainsi que dans des figures obsessionnelles et répétitives qui semblent venir du monde industriel – à moins que cela ne vienne d’une trans- mutation des musiques tribales d’Afrique, un continent qui fut berceau de ses premières impressions musicales. Par ailleurs, sa fascination pour les musiques « métalliques » (il a consacré un ouvrage sur le phénomène musical du black metal) le pousse à une densification du matériau et à une expressivité narra- tive incandescente qui porte littéralement l’interprète et son instrument à leurs limites. Mais ceci ne l’empêche pas de ménager, au détour d’une forme qui s’in- vente au fur et à mesure de la narration, des espaces de contemplation quasi immobiles, où l’attention est portée avant tout sur le timbre : la musique soudain s’épure et les textures allégées laissent alors apparaître des sons d’une douceur insoupçonnée mais travaillés à l’aide d’une multitude de différentiations qui se manifestent par l’attention extrême portée au moindre détail de l’instrumenta- tion, obéissant alors à un souci minutieux d’articulation des divers paramètres musicaux.

Ces caractéristiques générales qui mènent à une esthétique « tensionnelle » comme la décrit Hugues Dufourt, s’appliquent particulièrement bien à Encore le style de l’acier 1992 pour vibraphone seul car c’est autour de ce titre (embléma- tique du travail du compositeur) que se noue un étrange rapport entre écriture raisonnée et pulsion – une dialectique qui donne à sa musique une allure presque « improvisée » dans son résultat auditif, comme si l’énergie première découlait d’une source vierge et que le compositeur travaillait a posteriori le ma- tériau ainsi révélé.

Ceci est particulièrement sensible dans les cinquante premières mesures de la pièce (jouées ƒ–ƒƒ con potenza) où les figures répétitives récurrentes, comme improvisées justement, se transforment ensuite en des contrepoints savants, hautement organisés au niveau rythmique. Toute la première partie se déroule donc sur ce principe, poussant jusqu’à saturation les possibilités expressives du vibraphone, confiné ici dans les stridences des registres aigus et suraigus. Une section plus lente et libre s’intercale soudain avant une reprise variée des éléments du début qui débouche à son tour sur une sorte de « cadence » caractérisée par une écriture à présent plus linéaire, plus fluide aussi, où les modes de jeu enrichissent progressivement le timbre un peu monochrome des lames. Un court interlude suit (étrange avec son effet wa-wa produit avec la bouche de l’instrumentiste au dessus de la note sol) avant l’arrivée d’un épisode qui reprend, en l’amplifiant, les éléments du début, mais dans une complexité accrue et surtout un registre beaucoup plus étendu, donnant véritablement une dimension de développement à cette puissante section qui réinsère, périodiquement, la note sol et son effet wa-wa. Deux mesures en accords (une surprise dans une œuvre presque exclusivement polyphonique et mélodique – au sens des figures) déclenchent, par contraste, une courte coda, rapide et virtuose, qui culmine en une ultime mesure – un très court espace dans lequel est repris le matériau initial dans une irrésistible dynamique ascensionnelle.